4.1.7 Le patrimoine archéologique | Questionnaire CPCQ

4.1.7 Le patrimoine archéologique

Le patrimoine archéologique comprend d’abord les sites inscrits à l’Inventaire des sites archéologiques du Québec, lesquels témoignent de l’occupation humaine du territoire et permettent de comprendre l’histoire, la préhistoire et le contexte culturel. L’archéologie tente de reconstituer le passé en étudiant les différentes périodes de l’occupation humaine à partir des vestiges matériels découverts dans les couches successives du sol. Elle permet notamment d’illustrer des pans de la vie ancienne parfois absents des récits écrits ou, dans le cas du patrimoine autochtone de la période pré-contact, inexistants des livres d’histoire. Le patrimoine archéologique est souvent la seule source d’information sur plusieurs aspects du Vieux-Québec. Le patrimoine archéologique comprend aussi le potentiel archéologique toujours enfoui, qui pourrait éventuellement être découvert si des travaux d’excavation étaient effectués sur un territoire donné.

Les caractéristiques du patrimoine archéologique sont principalement en lien avec la valeur archéologique. Elles sont également à mettre en relation avec certains aspects de la valeur historique.

Les particularités du site patrimonial

Le site patrimonial du Vieux-Québec comprend 487 sites inscrits à l’Inventaire des sites archéologiques du Québec. La figure 25 illustre bien cette réalité. Ce nombre élevé – il s’agit du site patrimonial québécois comptant le plus de sites archéologiques – démontre l’intérêt archéologique du Vieux-Québec et justifie qu’il possède une valeur archéologique. Malgré les nombreux sites archéologiques connus et les travaux de construction et d’aménagement effectués au cours des siècles, il demeure possible de trouver des vestiges dans le site patrimonial. Ce potentiel archéologique est notamment établi à partir des sites existants. Il est également déduit à partir de schèmes d’établissement en ce qui a trait à l’occupation autochtone. Pour l’occupation euroquébécoise, le potentiel archéologique est aussi établi à partir de la superposition de cartes anciennes, qui permettent de localiser dans l’espace des bâtiments et des aménagements aujourd’hui disparus. À partir de ces différentes méthodes, il est possible d’évaluer la possibilité de trouver des biens archéologiques lors d’une excavation. Le potentiel demeure néanmoins théorique, et seule une intervention archéologique permet de le confirmer ou de l’infirmer. Le Ville de Québec possède un système informatique, SIGMA2, qui permet d’évaluer le potentiel archéologique de son territoire, dont le site patrimonial du Vieux-Québec.

Les sites archéologiques du Vieux-Québec illustrent une grande diversité d’activités interreliées (fig. 25). Celles-ci sont mises en place au fil des siècles pour favoriser l’adaptation humaine au lieu et pour le transformer. Plusieurs sites archéologiques ont accueilli diverses fonctions propres à l’évolution du Vieux-Québec et au développement de sa trame urbaine, que ce soit en un même moment ou à travers le temps. Par ailleurs, certains sites archéologiques se sont révélés particulièrement riches en informations relatives à une occupation (autochtone, euroquébécoise) ou à une période spécifiques.

Un site archéologique possède même une protection individuelle en vertu de la Loi sur le patrimoine culturel, soit le site patrimonial de l’Habitation-Samuel-De Champlain. Le classement de l’Habitation témoigne de manière éloquente de son importante, qui dépasse le cadre du site patrimonial du Vieux-Québec. Ce lieu à forte valeur historique, identitaire et archéologique contient des vestiges tangibles de la présence de Champlain et de la fondation de la ville. Il témoigne ainsi de la naissance de la Nouvelle-France et de l’Amérique française. Le secteur de la place Royale s’est développé autour de l’Habitation. Premier noyau urbain de la Nouvelle-France, il symbolise aujourd’hui la francophonie d’Amérique. La collection archéologique de référence de Place-Royale, classée bien patrimonial, regroupe environ 14 000 objets recueillis dans une soixantaine de sites. Très étudiée, cette collection est l’une des plus prestigieuses en Amérique du Nord.

L’occupation et la fonction des sites

Sites autochtones

Dans le site patrimonial du Vieux-Québec, la présence autochtone est illustrée par des sites archéologiques occupés avant la venue des Européens ou qui témoignent de contacts directs entre Européens et Autochtones. Cette présence autochtone remonte au moins à 5 000 ans AA.

La plupart des sites autochtones connus se composent d’objets isolés découverts dans des sols remués. Les sites de Place-Royale (CeEt-9, CeEt-201 et CeEt-601), de la place D’Youville (CeEt-387) et de l’îlot des Palais (CeEt-30) se distinguent cependant par la mise au jour de vestiges autochtones dans des contextes bien définis. Ils nous apportent alors une meilleure compréhension du mode de vie des Autochtones.

Place Royale : maison Hazeur (CeEt-201); rue Sous-le-Fort (CeEt-601);
Habitation Samuel-De Champlain (CeEt-9)

Les vestiges autochtones les plus anciens identifiés dans le secteur de Place-Royale ont été trouvés sur les sites de la maison Hazeur et de la rue Sous-le-Fort. Ils remontent à l’Archaïque récent (5 500 à 3 000 ans AA) et au Sylvicole inférieur (3 000 à 2 400 ans AA). Ces sites témoignent du passage de groupes restreints qui se sont adonnés au débitage du chert extrait de l’escarpement de Québec ou d’autres carrières à proximité et, dans une moindre mesure, à la fabrication d’outils avec cette roche.

Au Sylvicole moyen et au début du Sylvicole supérieur (2 400 à 800 AA), de petits groupes autochtones fréquentent la pointe de Québec pour des haltes estivales de quelques jours ou pour des séjours plus longs. Ces groupes exploitent les sources de chert à proximité ainsi que la faune et la flore associées à la présence du fleuve Saint-Laurent et de la rivière Saint-Charles. Les vestiges (foyers, sépultures, outils de pierre et d’os, vases de céramique, pipes de pierre et de céramique, restes alimentaires dont des grains de maïs, perles de coquillage) nous renseignent sur plusieurs aspects de leur mode de vie. À cette époque, l’endroit constitue un lieu de prédilection dans leur vaste territoire. Par la suite, l’emplacement ne semble plus aussi fréquenté, même s’il se situe vraisemblablement dans l’aire de rayonnement de grands villages établis par les Iroquoiens du Saint-Laurent, tel Stadaconé décrit dans les relations de voyage de Jacques Cartier.

En 1608, Samuel de Champlain observe que des Autochtones viennent pêcher dans l’embouchure de la rivière Saint-Charles. Les premiers contacts entre Français et Autochtones dans les limites de l’actuel site patrimonial sont illustrés sur le site de l’Habitation-Samuel-De Champlain. Les objets des deux cultures contenus dans une même couche archéologique, comme des perles de coquillage et des perles de verre, témoignent de leur cohabitation.

Place D’Youville (CeEt-387)
Le site archéologique de la place D’Youville a livré quelques outils de pierre et des débris de taille reliés à des traces de combustion. Bien que de peu d’ampleur, les vestiges indiquent une utilisation du territoire, dont l’exploitation des ressources lithiques du promontoire, probablement durant la période de l’Archaïque récent (5 500 à 3 000 ans AA).

Îlot des Palais (CeEt-30)
Un foyer associé à plusieurs éclats de pierre taillée atteste une présence autochtone en bordure de la rivière Saint-Charles aux environs de 700 ans AA, soit à la période du Sylvicole supérieur.

Sites euroquébécois

En ce qui a trait aux sites euroquébécois, le territoire du site patrimonial se divise en quatre zones. Elles comportent toutes des témoins des fonctions domestique et militaire. Chaque zone est également marquée par une ou quelques fonctions dominantes, en complément des fonctions domestique et militaire.

Les trois premières zones sont déterminées par la géographie du site patrimonial :

  • la partie de la basse-ville associée au fleuve Saint-Laurent, où se trouve notamment la place Royale, caractérisée par les fonctions navale et portuaire ainsi que commerciale;
  • la haute-ville, déployée sur le cap Diamant, caractérisée par la fonction institutionnelle;
  • la partie de la basse-ville associée à la rivière Saint-Charles, où s’est installé le palais de l’Intendant, caractérisée par les fonctions institutionnelle, industrielle ainsi que navale et portuaire.

La quatrième zone n’a pas de lien direct avec la géographie du site patrimonial. Il s’agit de celle des anciens faubourgs Saint-Jean et Saint-Roch, dont l’existence découle de la présence de la ville fortifiée. La zone occupe une assez grande superficie du Vieux-Québec, même si celle-ci paraît moindre par rapport à l’étendue actuelle des quartiers Saint-Jean-Baptiste et Saint-Roch. Les faubourgs sont, par définition, des quartiers périphériques et souvent hors d’une enceinte, comme c’est le cas pour le Vieux-Québec. Cette situation influence tant la population qui s’y installe, constituée en grande partie d’artisans et d’ouvriers, que les activités qui s’y déroulent (notamment la production de céramique, la tannerie et la production de bière), complémentaires de celles menées à l’intérieur des fortifications.

Des habitations multifonctionnelles et des places de marché
Les interventions archéologiques réalisées dans le site patrimonial du Vieux-Québec, notamment dans le secteur de la place Royale, révèlent le caractère multifonctionnel des résidences aux XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. En effet, celles-ci ne servaient pas uniquement comme lieu de résidence. Les caves et les cours recèlent des traces d’activités domestiques évidemment, mais également commerciales, artisanales et agricoles : puits, bases de cheminée, latrines, canalisations, revêtements de sol, pavages, murs de refend, murets et clôtures, dépendances, objets, restes alimentaires. Au nombre des objets considérés comme des marchandises, figurent plusieurs pipes non utilisées recueillies sur le site de l’Habitation-Samuel-De Champlain et un dépôt de 168 contenants de verre et de grès provenant de la maison Jean-Renaud.

À la haute-ville, les vestiges de la maison de ferme Hébert-Couillard, découverts sur le site du Séminaire de Québec, ont une grande valeur symbolique. Ils sont associés à Louis Hébert, premier colon à tirer sa subsistance du sol et à Guillaume Couillard, son gendre. Le site du monastère des Récollets renseigne sur l’urbanisation de la haute-ville au XVIIe siècle. En plus de sa fonction institutionnelle reliée à la présence de la communauté religieuse après leur retour en Nouvelle-France en 1670, il porte la trace de la présence des artisans Philippeau et Soulard, d’un membre du Conseil souverain, Nicolas Dupont de Neuville (vers 1632-1716), et du chirurgien Jean Madry (vers 1625-1669). La contribution la plus originale de l’inventaire archéologique mené sur ce site concerne cependant la connaissance des jardins du monastère.

Dans la partie du site patrimonial correspondant aux anciens faubourgs Saint-Roch et Saint-Jean, la fonction résidentielle est particulièrement bien illustrée par les sites archéologiques de la place D’Youville et de l’îlot Méduse.

L’agriculture pratiquée sur la ferme Hébert-Couillard au début du XVIIe siècle s’est perpétuée à travers les grands jardins des communautés religieuses comme les Augustines et les Ursulines, ceux des gouverneurs aux châteaux Saint-Louis, ceux du palais de l’Intendant ainsi que dans les potagers des particuliers. Mentionnons aussi qu’il n’était pas rare qu’on élève quelques animaux de boucherie dans les cours et que les chevaux et les écuries étaient omniprésents. Malgré cette agriculture urbaine, les marchés étaient indispensables à l’approvisionnement des citadins en produits frais. Ceux-ci provenaient des campagnes environnantes de Québec, dont l’île d’Orléans. À travers le temps, plusieurs marchés ont été aménagés dans le site patrimonial, dont le marché de la place Royale, le marché Finlay – correspondant approximativement à l’actuelle place de Paris –, le marché de la Haute-Ville – correspondant approximativement à l’emplacement actuel de la place de l’Hôtel-de-Ville – et le marché Montcalm – correspondant approximativement à l’emplacement de l’actuel palais Montcalm. Ils ont été l’objet d’interventions archéologiques.

Les institutions civiles
D’importantes fouilles archéologiques ont été menées sur les principaux lieux de pouvoir de la colonie : habitation de Champlain, châteaux Saint-Louis, palais de l’Intendant. Ces lieux étaient fortifiés, et ils remplissaient plusieurs fonctions. Sous le Régime français, l’influence du gouverneur et de l’intendant s’étend sur un immense territoire alors que Québec est le siège de l’empire français en Amérique. Les collections archéologiques du lieu historique national du Canada des Forts-et-Châteaux-Saint-Louis et de l’îlot des Palais se rangent, avec celles de Place-Royale, parmi les plus importantes et les plus significatives en Amérique du Nord.

Des interventions archéologiques ont également été réalisées au parc Montmorency. Le site est d’abord occupé par le palais épiscopal à partir de 1692. Après la Conquête, le palais épiscopal est rétabli. Il est loué au gouvernement et accueille la première Assemblée législative du Bas-Canada en 1792, puis le Parlement du Bas-Canada. Après 1840, le bâtiment abrite le Parlement du Canada-Uni. Le palais est remplacé au milieu du XIXe siècle par un édifice plus important, qui sera la proie des flammes en 1883. Le site du Morrin College a livré des données essentielles sur l’organisation de la prison commune construite au début du XIXe siècle.

Tous ces sites présentent des portions résiduelles ayant un fort potentiel de recherche et de mise en valeur.

Les fortifications
À cause de sa position stratégique et en tant que siège du gouvernement colonial durant une grande partie de son histoire, la ville de Québec devait être fortifiée. D’autres villes importantes au Québec étaient également fortifiées aux XVIIe et XVIIIe siècle, dont Montréal, Trois-Rivières et La Prairie. Des vestiges des fortifications se trouvent dans les quatre zones précédemment décrites, autant en basse-ville qu’en haute-ville. Mentionnons les batteries Royale et Dauphine (site de l’îlot Hunt) à la place Royale en basse-ville, le cavalier du Moulin dans le parc du même nom en haute-ville, les fortifications de l’îlot des Palais en basse-ville et les ouvrages militaires des lieux historiques nationaux du Canada des Forts-et-Châteaux-Saint-Louis – sous l’actuelle terrasse Dufferin –, des Fortifications-de-Québec et de la Citadelle-de-Québec ainsi que du parc de l’Artillerie.

Des vestiges des lignes de défense qui se sont succédé du côté ouest de la haute-ville ont été mis au jour, soit :

  • la palissade simple du major François Provost complétée par onze petites redoutes de pierre, élevée à la hâte en 1690, dont des sections ont été dégagées au parc de l’Artillerie;
  • le rempart de terre palissadé de Josué Dubois Berthelot de Beaucours entrepris en 1693, auquel est associé le cavalier du Moulin. Également associées à cette ligne de défense, les redoutes Royale (site du Morrin College) et Dauphine (parc de l’Artillerie) sont toutefois postérieures;
  • la ligne de défense entreprise par Jacques Levasseur de Néré au début du XVIIIe siècle, dont le premier bastion Saint-Louis;
  • l’enceinte actuelle et ses ouvrages avancés, conçus par Gaspard-Joseph Chaussegros de Léry, mis en place à partir de 1745.

Par ailleurs, la guerre de la Conquête (1754-1760) a laissé son empreinte sur de nombreux sites à la haute et à la basse-ville. Sur le site du Séminaire de Québec, par exemple, des pièces d’artillerie, des munitions et des cratères de bombes ont été découverts. Les bombardements de 1759 sont aussi bien illustrés à l’îlot des Palais, de même que l’invasion américaine (1775) qui a dévasté le troisième palais de l’Intendant.

Après la Conquête et jusqu’au départ de la garnison en 1871, les Britanniques ont complété les défenses de la ville, notamment en y ajoutant des ouvrages avancés dont des vestiges ont été mis au jour à la place D’Youville et à la place de l’Assemblée-Nationale. L’élément majeur de leur intervention est la citadelle aménagée de 1820 à 1832.

Les ports et les chantiers maritimes
Avec les fortifications, le port constitue le symbole par excellence de la puissance coloniale. Ceci est d’autant plus vrai que Québec marque la fin de la navigation transatlantique et le début de la navigation fluviale, jusqu’au milieu du XIXe siècle. C’est donc un endroit stratégique où sont débarquées les marchandises arrivant dans la colonie et d’où partent les cargaisons destinées au commerce extérieur.

Le site patrimonial du Vieux-Québec comprend historiquement trois zones portuaires :

  • le port du Cul-de-Sac, situé à l’emplacement de l’actuelle traverse Québec-Lévis, est le plus ancien. Jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, la grève a servi à l’échouage des embarcations, à la réparation et à l’hivernage des navires ainsi qu’à la construction de petits bateaux. Le chantier naval du Roy s’y est implanté en 1748. Ce lieu n’a pas été fouillé, mais d’importants vestiges pourraient subsister sous les espaces libres actuels;
  • le port de la basse-ville, compris entre la batterie Royale et la rue Saint-Paul, prend forme à la fin du XVIIe siècle grâce au remblayage des berges. Les quais commerciaux bâtis par les particuliers jouent aussi un rôle militaire avec l’établissement de batteries. Sous le Régime anglais, la fonction de défense est abandonnée. Les marchands privilégient alors l’aménagement de quais en eaux profondes. Les sites de la batterie Royale, du marché Finlay, de l’îlot Hunt, du Musée de la civilisation, de l’îlot Bell et de la place Dalhousie (place des Canotiers) témoignent de ce front portuaire;
  • le port Saint-Nicolas, aussi appelé le havre du Palais, était situé dans l’embouchure de la rivière Saint-Charles, à proximité de l’îlot des Palais. De 1666 à 1671, Jean Talon et Charles Aubert de La Chesnaye y opèrent un chantier maritime. Les possibilités d’échouage s’améliorent avec la construction d’une digue sur la rivière à compter de 1733. Sur le site de la gare du Palais, situé partiellement dans le site patrimonial, les archéologues ont dégagé des vestiges du chantier naval du Roy, qui a occupé les lieux de 1739 à 1747 : caissons des quais, cale de construction, rampe de lancement des navires. Ils ont aussi trouvé l’épave d’un bateau incendié lors de l’invasion américaine en 1775.

Les institutions religieuses
La présence religieuse dans le Vieux-Québec se reflète notamment dans les sites archéologiques du monastère des Récollets et du collège des Jésuites, établissements aujourd’hui disparus du site patrimonial, ainsi que dans ceux du Séminaire de Québec, du monastère des Ursulines et du monastère des Augustines, institutions toujours présentes. Ils ont apporté des informations de première importance sur leurs aménagements et sur la vie de leurs occupants.

Par ailleurs, les fouilles archéologiques au cimetière Sainte-Famille (site de la basilique-cathédrale de Notre-Dame-de-Québec) et au cimetière Sainte-Anne, deux des nombreux cimetières qui ont occupé le site patrimonial au cours de son histoire, ont permis de mieux connaître l’état de santé de la population aux XVIIe et XVIIIe siècles et certains aspects de la salubrité urbaine.

Depuis le XIXe siècle, la recherche de la chapelle de Notre-Dame-de-la-Recouvrance et de la chapelle de Champlain a occupé plusieurs passionnés d’archéologie sans donner de résultats probants. À ces investigations se rattache la localisation de la sépulture de Champlain, qui demeure inconnue à ce jour.

Ateliers d’artisans et industries
La fonction artisanale était historiquement présente dans tout le site patrimonial, car les rez-de-chaussée des habitations étaient souvent utilisés comme atelier. On remarque une certaine spécialisation selon les zones. Diverses raisons expliquent cet état de choses, comme la proximité des ressources ou des équipements, la prévention des incendies et la nécessité d’isoler certaines activités particulièrement polluantes.

À l’îlot Hunt, les archéologues ont découvert plus de 400 fragments de cuir dans un contexte de la fin du XVIIe siècle, ce qui permet de jeter un regard sur les savoir-faire associés aux métiers du cuir en Nouvelle-France. Le site a également livré des données sur le travail d’un des nombreux tonneliers qui fournissaient le port de Québec au XIXe siècle. Le site de l’ancien entrepôt Vallerand (67, rue Dalhousie), dont il ne subsiste qu’un seul bâtiment ancien, a livré plusieurs artefacts puisque son sous-sol regorgeait de tessons de vaisselles provenant des importations d’Angleterre et d’outre-mer. Des interventions archéologiques rue De Saint-Vallier et côte d’Abraham renseignent, par ailleurs, sur l’activité de tanneurs, de cornetiers et de potiers. Leurs ateliers étaient localisés en marge des zones plus densément peuplées et profitaient de la proximité de la rivière Saint-Charles.

L’îlot des Palais a vu naître les premières industries en Nouvelle-France, soit à l’époque de l’intendant Talon de 1665 à 1672. Ces industries comprenaient notamment un chantier maritime, une brasserie et une fabrique de potasse. Elles visaient à diversifier l’économie coloniale jusque-là axée sur la traite des fourrures. Leur regroupement faisait de cet endroit le premier centre industriel de la Nouvelle-France. Au XVIIIe siècle, l’espace s’est réorganisé autour du palais de l’Intendant. Plusieurs gens de métier y travaillent. Une boulangerie, une malterie et la brasserie Boswell-Dow ont par la suite occupé l’emplacement aux XIXe et XXe siècles.

L’exiguïté du Vieux-Québec et la densité des constructions existantes ont empêché le développement de grandes industries à l’intérieur des fortifications. Mentionnons cependant l’usine de munition de l’armée canadienne, devenue l’Arsenal du Dominion, située à l’emplacement actuelle du parc de l’Artillerie. Cette usine, qui a été en activité de 1882 à 1964, a joué un rôle prépondérant dans l’effort de guerre du Canada pendant les deux guerres mondiales.

Réseaux publics et salubrité
Les interventions archéologiques permettent de documenter l’évolution du réseau viaire. Celui-ci se transforme dans le temps, notamment au regard du tracé des rues et de leur aménagement, par exemple la pose de pavés sur le chemin reliant le château Saint-Louis au Palais de l’Intendant. Elles apportent également un regard particulier sur la salubrité urbaine par les informations recueillies sur l’approvisionnement en eau, l’évacuation des déchets et l’organisation des réseaux sanitaires ainsi que sur d’autres équipements publics (téléphonie, transports publics).

La datation des sites archéologiques

L’occupation autochtone est représentée par une présence humaine ponctuelle de l’Archaïque récent laurentien (5 500 à 4 200 ans AA) au Sylvicole supérieur (1 000 à 450 ans AA). À part deux sites rattachés à des découvertes isolées, tous les sites autochtones ont aussi une composante euroquébécoise.

L’occupation euroquébécoise, quant à elle, s’étend souvent sur de très longues périodes. Parmi les sites datés, approximativement 129 remontent au Régime français; approximativement 97, à la période 1760-1799; approximativement 173, à la période post-180019.

Sites archéologiques autochtones (17)

  • autochtone pré-contact indéterminé = 2 sites
  • autochtone pré-contact indéterminé et euroquébécois20 = 10 sites
  • Archaïque récent (5 500 à 3 000 ans AA) et euroquébécois = 1 site (CeEt-387)
  • Archaïque récent laurentien (5 500 à 4 200 ans AA), Sylvicole inférieur (3 000 à 2 400 ans AA), Sylvicole supérieur (1 000 à 450 ans AA) et euroquébécois = 1 site (CeEt-201)
  • Sylvicole inférieur (3 000 à 2 400 ans AA), Sylvicole moyen (2 400 à 1 000 ans AA) et euroquébécois = 1 site (CeEt-601)
  • Sylvicole moyen (2 400 à 1 000 ans AA), Sylvicole supérieur (1 000 à 450 ans AA), autochtone historique ancien 1500 à 1899 et euroquébécois = 1 site (CeEt-9)
  • Sylvicole supérieur (1 000 à 450 ans AA) et euroquébécois = 1 site (CeEt-30)

Sites archéologiques euroquébécois (467)

  • euroquébécois 1608-1759 = 11 sites
  • euroquébécois 1608-1799 = 5 sites
  • euroquébécois 1608-1950 = 114 sites
  • euroquébécois 1760-1799 = 4 sites
  • euroquébécois 1760-1950 = 93 sites
  • euroquébécois 1800-1950 = 173 sites
  • euroquébécois indéterminé = 67 sites

La fonction des sites archéologiques

Un site autochtone a été identifié comme un lieu de séjour plus ou moins prolongé; les autres sites autochtones sont des ateliers de taille de la pierre qui présentent des occupations ponctuelles où les gens ont notamment taillé de la pierre.

Pour la période euroquébécoise, retenons que la plupart de sites sont multifonctionnels et que le tableau reflète la complexité de la ville et de son évolution depuis plus de 400 ans.

Occupation autochtone

  • artisanale (atelier de taille de la pierre) = 3 sites (CeEt-601, CeEt-387, CeEt-30)
  • halte et artisanale (atelier de taille de la pierre) = 1 site (CeEt-9)

Occupation euroquébécoise

  • domestique = 93 sites (dont 69 à Place-Royale)
  • commerciale = 15 sites (dont 3 à Place-Royale)
  • militaire = 17 sites (dont 2 à Place-Royale)
  • navale et portuaire = 9 sites (dont 5 à Place-Royale)
  • institutionnelle civile = 6 sites (dont 1 à Place-Royale)
  • institutionnelle religieuse = 15 sites (dont 1 à Place-Royale)
  • artisanale et industrielle = 14 sites

La localisation des sites archéologiques

Les 487 sites inscrits à l’ISAQ sont répartis dans l’ensemble du site patrimonial du Vieux-Québec. Ce nombre très élevé démontre que la possibilité de trouver des vestiges ailleurs dans le site patrimonial reste réelle en dépit de tous les travaux qui y ont été effectués. La plupart des sites significatifs comprennent des portions résiduelles qui offrent un fort potentiel de recherche et de mise en valeur.

Occupation autochtone

La répartition des sites archéologiques autochtones suggère une exploitation des ressources des rives du fleuve Saint-Laurent, des berges de la rivière Saint-Charles et du promontoire.

Depuis le XIXe siècle, différentes hypothèses ont été avancées quant à l’emplacement du village iroquoien de Stadaconé décrit par Jacques Cartier. Les plus récentes le localisent aux abords de la rivière Saint-Charles. En raison du déplacement des villages iroquoiens à tous les 15 ou 20 ans, une douzaine de Stadaconé ont pu se succéder entre 700 ans AA, moment où l’agriculture est vraisemblablement apparue dans la région de Québec, et 1535, date de la venue de Cartier. Il n’est donc pas impossible qu’un ou plusieurs de ces emplacements se situent dans les limites du site patrimonial.

Occupation euroquébécoise

Les habitations de la place Royale ont fait l’objet d’interventions archéologiques dans le cadre du projet de restauration de Place-Royale, ce qui explique en partie la concentration de sites domestiques dans ce secteur. L’ensemble du territoire du site patrimonial a cependant été habité densément. D’autres lieux pourraient donc se révéler d’un grand intérêt pour la connaissance de l’occupation résidentielle du Vieux-Québec et des activités commerciales et artisanales qui l’accompagnent souvent.

Les sites institutionnels, civils et religieux se trouvent majoritairement à la haute-ville. Deux lieux de pouvoir, l’habitation de Samuel de Champlain et le palais de l’Intendant, ont été établis à la basse-ville sous le Régime français. Ils ont fait l’objet d’interventions archéologiques soutenues.

L’entretien et la restauration des fortifications, en haute-ville, font en sorte qu’elles sont bien documentées. En conséquence, la majorité des sites militaires inscrits à l’ISAQ se retrouvent en haute-ville. Néanmoins, la basse-ville a aussi accueilli des ouvrages militaires au cours de son histoire, comme en témoignent les sites archéologiques de la batterie Royale, de la batterie Dauphine et de l’îlot des Palais.

La fonction navale et portuaire est concentrée à la basse-ville, en bordure du fleuve Saint-Laurent et de la rivière Saint-Charles. Durant tout le Régime français, cette fonction a été intimement associée à la fonction militaire, les quais privés ayant été mis à profit pour la construction de batteries. L’emplacement du port du Cul-de-Sac, qui n’a pas encore été l’objet d’interventions archéologiques, pourrait receler d’importants vestiges relatifs à la construction navale.

La fonction artisanale était omniprésente dans le site patrimonial. Certains sites archéologiques de la place Royale nous renseignent sur le travail de cordonniers et de tonneliers. Les sites archéologiques de potiers, de tanneurs et de cornetiers sont plutôt localisés à la basse-ville, à proximité de la rivière Saint-Charles.
Les fortifications limitant l’expansion de la haute-ville, le développement industriel s’est orienté hors de l’enceinte. Tout comme certaines activités artisanales, cette fonction se trouve concentrée à la basse-ville, à proximité de la rivière Saint-Charles.

Le patrimoine archéologique en bref

Le site patrimonial du Vieux-Québec compte 487 sites archéologiques inscrits à l’Inventaire des sites archéologiques du Québec

Les sites archéologiques renseignent d’abord sur l’occupation pré-contact du territoire par les Autochtones, dont le plus ancien identifié dans le secteur de Place-Royale (CeEt-201)

Les sites euroquébécois, plus nombreux, renseignent sur une variété de fonctions propres à l’occupation du site patrimonial depuis 1608, dont domestique, militaire et institutionnelle. Ils sont répartis en quatre zones

La conservation et la mise en valeur des ouvrages – notamment les fortifications – ainsi que des vestiges – notamment à l’îlot des Palais, au parc de la Cetière, au Musée de la civilisation, à l’auberge Saint-Antoine, sous la terrasse Dufferin (château Saint-Louis), à la maison Hébert-Couillard, à l’hôtel de ville (collège des Jésuites) et à la place de l’Assemblée-Nationale (ouvrages avancées)

PC-fig25 Figure 25
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Plusieurs recherches archéologiques sont menées chaque année dans le site patrimonial. Il en résulte parfois la découverte de nouveaux sites archéologiques. Plus fréquemment, les recherches permettent de mieux documenter des sites archéologiques déjà connus. Ainsi les statistiques sur la datation et la fonction des sites archéologiques peuvent-elles évoluer d’une année à l’autre. Les chiffres donnés sont des approximations qui donnent un ordre de grandeur.

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Dans le présent cas, les sites mentionnés comprennent à la fois une occupation autochtone pré-contact que les recherches ne permettent pas de dater ainsi qu’une occupation euroquébécoise.